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Afpa : dépenser moins pour former vite et mal



Source Rue89:| 12/03/2009

Suite à l'article « Afpa : être payé pour être formé, ça ne va plus être possible », publié le 10 mars, Ajuga, formateur qui souhaite rester anonyme, souhaite témoigner de son expérience : pour lui, les conseils régionaux de gauche appliquent exactement la même technique de réduction des coûts que la droite gouvernementale.

Moi aussi je suis formateur à l'Afpa. En réseau informatique. Bac+2.
Je ne me lancerais pas dans le débat sur l'UMP et les syndicats.
En revanche, il y a des éléments indépendants de ça.
La volonté de base, c'est de dépenser le moins possible, donc de baisser au maximum les coûts. Nationaux d'abord par la régionalisation et les appels d'offres. Là, les conseils régionaux dits de gauche appliquent exactement la même technique de réduction des coûts que la droite gouvernementale, faut pas croire.

Une productivité en hausse constante

En dix ans, notre formation est passée de vingt à trente stagiaires. Avec l'expérience professionnelle, c'est jouable. Mais du coup, les formateurs n'ont plus le temps de travailler sur l'évolution des produits, ce qui peut, à moyen terme, obérer fortement la qualité des stagiaires qui sortent. Et le niveau national n'a pas assez de personnel pour le faire (car non productif directement des fameuses « heures stagiaires », seul critère pris réellement en compte) et doit compter sur les formateurs éventuellement dégagés par leur directeur.

Je peux dire que ça fait maintenant dix ans que je n'ai eu aucun dégagement pour ça, mon directeur m'a expliqué qu'il ne voyait pas d'inconvénient à ce que je participe à ce genre d'étude… le week-end).

Des temps de formation réduits

Le temps de formation est réduit : dans mon cas, 300 heures, ce n'est pas rien. Ça fait presque deux mois ! Sur une formation d'un an, ça fait mal. Et ce n'est qu'un début : l'idée développée en ce moment, c'est de faire des modules courts, très adaptés à des produits donnés, qui permettra aux gens d'être immédiatement employables sur le produit en question, mais sans compétences générales.

Pour faire court, il est plus difficile et plus long d'enseigner à faire un cahier des charges ou une proposition d'organisation informatique que de savoir utiliser Linux version X.Y.Z. ou Windows server).

La sélection à l'entrée

Ensuite, on sélectionne les « clients » qui rapportent : priorité aux CIF. Ah, bien sûr, comme les Fongecifs (fonds de gestion du congé individuel de formation) et autres organismes veulent eux aussi dépenser moins, ils vont demander une participation (on vient de faire signer à un stagiaire un apport de 3000 euros, oui, trois mille ! ).

Par anticipation, certaines Afpa régionales ont supprimé les formations informatiques (vu l'âge moyen des profs, ce n'est pas dur). Bien sûr, si vous êtes chômeur dans une telle région, vous pouvez, en théorie, aller dans une autre région. Mais pourquoi la région X financerait-elle les chômeurs de la région Y, qui ont toutes les chances de repartir chez eux ? Et ma foi, c'est ce que nous commençons à voir : en gros 90% des gens qui entrent dans notre formation sont des locaux.

La suppression des coûts annexes

Hébergement, cantine, foyer… ça a un coût, que les régions ne veulent pas voir, et surtout pas intégrer dans le prix des formations en général (au nom de la concurrence, on n'en parle pas dans les appels d'offre). Prenons un exemple : un nouvel hébergement est en construction à Toulouse, il sera géré par une boite extérieure et réservé totalement aux gens ayant l'aide au logement (et qui ne l'utilisent pas déjà pour loger une famille). Les autres ? euh, qui s'en soucie ? Eh bien pour l'instant, il y a les vieux hébergements, que ladite société extérieure n'a pas voulu reprendre tellement ils sont en mauvais état. Et qui entretiendra ces derniers ? Bonne question.

J'espère donc que vous n'êtes pas un chômeur avec une famille qui veut faire de l'informatique et qui habite, tiens, Mendes par exemple, parce que vous pourrez crever la gueule ouverte. Tout le monde s'en fout. Enfin, pas exactement : on vous répondra qu'on est absolument désolé, mais que c'est la seule chose que nous puissions faire, que c'est l'évolution de la société, et « vae victis ».

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Commentaire perso :

Effectivement le monde de la formation ne va pas en s'améliorant (regardons l'EN ! ), la gestion passant avant le développement des compétences ou la reconnaissance des salariés.
Ceci dit l'Afpa reste une entreprise (association..pardon) avec des formateurs très compétents et beaucoup de moyens pédagogiques (salles, ateliers, chantiers, supports....). L'esprit social et l'envie d'aider les plus démunis (qualifications, finances..) est encore bien présent. Bien sur, les nouveaux modes de financements (régions, OPCA, entreprises...) impactent cet esprit social et les conditions de formation (et de recrutement) des stagiaires. Cela touchent aussi la précarisation de ses salariés précaires en CDD, intérim...
Mais pour moi, l'Afpa est toujours la référence en matière de formation et d'insertion professionnelle.


30/03/2011
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